Tuffery, la manufacture éco-responsable au savoir-faire perdu
L’atelier Tuffery est l’une des dernières manufactures françaises à produire des jeans made in France, avec des matériaux locaux. Perchés au cœur des Cévennes, Julien et Myriam Tuffery n’ont pas hésité à ouvrir un pop-up store éphémère à Toulouse, du 21 janvier au 1er février.

Munis d’une volonté de fer et avant tout, de leurs accessoires, le couple ouvre un pop-up store du 21 janvier au 1er février, à deux pas du Capitole, au salon Guerlain de l’Hôtel Albert 1ᵉʳ. Fabriqués en Lozère, à Florac, les jeans, chemises, jackets et autres sont confectionnés par les 38 salariés de la maison Tuffery. S’ils ne sont pas vendus au sein de leurs boutiques implantées à Montpellier, c’est qu’ils ont été vendus sur Internet.
Chaque jour, « environ 150 jeans sortent d’usine grâce à nos employés », lance Julien Tuffery, co-directeur de l’entreprise avec sa femme, et tailleur professionnel.
L’entreprise n’a pas de frontière. Elle envoie ses commandes partout en France et dans le monde. Un rayonnement qui lui vaut un chiffre d’affaires de 5 millions d’euros par an, hors taxes, « simplement avec la stratégie de vente directe, on refuse les avances des marques de luxe », se démarque le tailleur professionnel. Pour autant, leur plus grande fierté repose sur une démarche durable.

L’atelier Tuffery adopte une démarche éco-responsable
Dans un monde où il suffit d’un simple clic pour commander des vêtements, toujours plus nombreux dans les placards… rares sont les entreprises qui réduisent leurs marges pour donner des conditions de travail décentes à leurs employés. « Mais notre maison ne fait pas comme la France d’antan ou l’Inde, on ne fait pas travailler nos employés à la chaîne, dans des conditions épouvantables. », celles-ci ont vocation à être optimales, explique le tailleur. Quelques raisons pour lesquelles les jeans peuvent paraître chers, toutefois il faut dire « que pour un jean acheté 100 euros à notre atelier, 75 euros reviennent à la production », justifie Julien Tuffery.
Un prix qui se justifie également par la démarche écologique. Le coton, il est cher, il est gourmand en eau, et il traverse les océans, car les cultures de coton en Europe se font rares. Pour pallier ce problème, la société a décidé de créer une partie de sa production à base d’autres matières plus responsables. Parmi lesquelles, le lin, la laine de brebis et le chanvre. Ainsi, « 10 à 20 % de nos confections sont locales, nous permettant de renouer avec les producteurs de la région durablement. », précise Myriam Tuffery. À poids égal, la confection d’un jean chez les Tuffery émet au moins trois fois moins. Une véritable éthique se dégage, avec pour objectif « de pouvoir céder une entreprise humaine, écologique et durable dans 30 ans », se projette le couple.
Le futur se mêlant au passé, à l’occasion d’une conférence tenue mardi, le couple est revenu sur l’histoire mouvementée de la maison Tuffery.

Dans les années 1980, l’entreprise passe au bord de la faillite
Mais elle passe surtout de soixante employés à trois. « Si on en est là aujourd’hui avec ma femme, c’est grâce à Célestin Tuffery, tailleur professionnel créateur de l’atelier, et pionnier du jean français », se remémore le directeur de l’entreprise. Mûre de 133 ans d’histoire, l’atelier a vu passer les révolutions industrielles, les deux guerres mondiales et les Trente Glorieuses. L’histoire n’a pas encore eu raison de cette entité, malgré les nombreuses difficultés auxquelles les quatre générations Tuffery se sont heurtées.
Depuis cette date, l’entreprise connaissait une stabilité croissante, jusqu’à atteindre son apogée en termes de production, en 1970. À cette époque, ce ne sont pas moins de 500 jeans par jour qui sortaient de l’usine de Florac. Mais c’était sans compter sur « la rapidité avec laquelle la mondialisation est venue ruiner la manufacture française », se désole le couple d’entrepreneurs. Il n’a pas fallu plus de temps à la France pour fermer 90 % des manufactures françaises dans les années 1980. Résistants, « jugés marginaux pour certains, mon père et mes deux oncles ont continué malgré tout à produire des jeans made in France, pour les quelques 2000 fidèles locaux. », dans une époque où il devenait rare de parler éthique, développe le fabricant.
C’est bien des années plus tard, en 2014, que Julien et Myriam Tuffery reprirent l’entreprise pour en faire ce qu’elle est aujourd’hui. Deux ateliers, une boutique, des partenaires, mais surtout des valeurs…